Friday 11 November 2011

Life from the EC: new job, the greatest bonanza?

By guest blogger The Chained Servant.

D’abord, on vous donne votre badge. Vous êtes fiers et un peu anxieux. Une fois obtenu le précieux sésame qui doit faire de vous un bureaucrate professionnel, vous gagnez votre immeuble, celui où vous allez passer une majeure partie de vos prochaines années et peut être du reste de votre vie. Finalement, on entre et cette fois, c’est pour de bon, on fait partie de la maison, un cerbère inspecte votre badge avec votre nom, votre photo et votre ruban bleu, le numéro d’identification à cinq chiffres est bien visible. 
Mi- inquiet, mi- excité, on est conduit à son bureau par une assistante pressée. Le chemin est long et monotone. Le long de couloirs tous identiques, les bureaux succèdent aux bureaux, de petites boîtes grises succèdent à de petites boîtes grises. On est frappé par l’uniformité morne d’un interminable corridor et la laideur d’un costume que l’on croise en pressant le pas. Partout flotte cette odeur sirupeuse de mauvais parfum et d’after shave bon marché.  Peu importe, vous n’êtes pas là pour travailler dans la mode, n’est ce pas ? Non, ce que vous allez faire, même si vous ne le savez pas encore, est bien plus important, paraît-il.
Ca y est, on découvre son bureau : il est gris, froid et petit. Il donne sur une autre rangée de petites boîtes toutes identiques à la vôtre. La lumière est absente mais heureusement des néons blafards sont là pour vous offrir un peu de chaleur glacée. Pas de souci, vous avez un idéal à faire partager, vous êtes là pour faire progresser une idée généreuse et magnifique, vous êtes motivé et prêt à tout donner pour faire triompher vos idées et vous faire remarquer. Vous êtes jeune et plein d’ambitions. Tant pis si la petite boîte dans laquelle on vous a placé n’est pas très accueillante, tant pis si le téléphone ne fonctionne pas, tant pis si votre connexion internet est inaccessible car vous n’avez pas les trois mots de passe nécessaires, tant pis si votre bureau est nu, vous n’avez pas même de quoi écrire, tant pis si votre chef, en tout cas, celui qui devra jouer ce rôle, est en vacances et que vous ne savez toujours pas quelles tâches vous allez devoir accomplir.
La semaine suivante, après avoir vaincu les premiers obstacles, envoyé quinze messages pour obtenir que le téléphone fonctionne, rempli trois documents différents pour obtenir vos droits à la caisse d’assurance maladie, lu un manuel incompréhensible pour obtenir vos trois mots de passe, découvert la clef qui mène à l’armoire presque vide des fournitures de bureaux, vous être équipé de petits dossiers cartonnés jaunes, verts et bleus et finalement rempli d’autres formulaires administratifs pour obtenir de l’aide car votre fenêtre ne parvient pas à s’ouvrir et que vous étouffez … vous commencez. Tremble le monde ! Un bureaucrate arrive, plein de fougue et d’espoir !
Mais très vite, vous auriez préféré ne jamais avoir trouvé le chemin de l’intranet, vous priez pour que le téléphone n’ait jamais fonctionné et vous imaginez un monde où les petits dossiers cartonnés de couleur jaune, verte et bleue seraient restés à l’ombre de leur armoire. Car ces couleurs, bientôt, vous font vomir, les petits dossiers cartonnés s’accumulent en un ouragan sur votre bureau ; votre chef qui n’est pas beaucoup plus là qu’avant parvient néanmoins à vous faire parvenir une multitude de nouveaux dossiers à traiter ; des collègues vous appellent en hurlant car vous n’avez pas respecté la procédure. Vous tentez de leur expliquer que vous êtes nouveau et que vous croyiez bien faire mais non, vous n’êtes qu’un petit rivet d’une grande machine et chaque rivet a un rôle bien précis, qu’aucun autre rivet ne doit vouloir s’accaparer. Vous le comprenez mais un peu tard. Beaucoup de rivets se sont déjà plaints de vous. Vous ne respectez pas les procédures ! Mais quelles procédures, vous lisez et relisez le manuel de procédures mais vous n’avez plus de temps, les petits dossiers jaunes, verts et bleus s’empilent et demandent à être traités…tout de suite… Une gigantesque bacchanale de papier a lieu sur votre bureau, les petits dossiers cartonnés ne cessent de s’accoupler et de se reproduire. Vous croyez même les entendre rire tandis qu’ils se multiplient en un spectacle obscène. 
Les coups de fils succèdent aux coups de fil, les hurlements succèdent aux hurlements… Votre chef part en week-end un vendredi vers 14h00 en n’oubliant pas de vous laisser quelques dossiers urgents qu’il n’a pas eu le temps de traiter, il est tellement occupé. Mais vous ne savez pas quelle est la procédure pour ces dossiers, damnation… vous êtes perdu car sans procédure, vous ne pouvez rien faire. La procédure est la pierre angulaire de toute administration, garante absolue de l’efficacité, elle régit et commande tout et tout le monde. Mais vous ne la connaissez pas, vous ne la maîtrisez pas, vous ne la comprenez pas. Tout sera donc à refaire mais vous n’avez pas le temps, personne n’est là pour signer l’autorisation qui vous permettra de parvenir à la prochaine étape de la procédure.  La grande machine est bloquée, le dossier ne peut plus avancer, vous avez besoin d’air mais la fenêtre ne s’ouvre toujours pas, vous êtes soudain bien seul dans votre petite boîte grise sous la lumière blafarde du néon.
Mais tant pis, car vous avez un idéal à défendre et vous voulez faire progresser un concept généreux et magnifique,  n’oubliez pas…vous êtes fonctionnaire européen.

The Chain Servant is a blogger for Bruxpat. He has just moved to Brussels. When he is not busy wondering how to escape from his new work at the European Commission, he enjoys reading, cooking and above all cleaning.

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